La
grève des étudiants contre la hausse des frais de scolarité;
Dis-moi
quel média tu consultes et je te dirai si tu es rouge ou vert!
La grève a fait
couler beaucoup d’encre – énormément d’encre! En fait, selon Influence
Communication, elle est la nouvelle la plus importante depuis février :
La couverture du conflit étudiant dans les médias
traditionnels :
Date
|
Poids médias[1]
|
Rang
|
14-20 février
|
0,53
|
5
|
21-27 février
|
2,16
|
3
|
28 au 5 mars
|
1,43
|
1
|
6 au 12 mars
|
1,73
|
1
|
13 - 19 mars
|
1,85
|
1
|
20 - 26 mars
|
2,21
|
1
|
27 au 2 avril
|
2,16
|
3
|
3 au 9 avril
|
2,03
|
1
|
10 au 16 avril
|
3,21
|
1
|
17 au 23 avril
|
4,36
|
1
|
24 au 30 avril
|
6,25
|
1
|
1 au 7 mai
|
6,68
|
1
|
8 au 14 mai
|
8.24
|
1
|
Source : Influence Communication
Dans les médias
traditionnels (journaux, magazines, télévision, radio), la couverture du
conflit étudiant n’a donc cessé d’enfler! Bien que le conflit ait été amplement
couvert par les médias trad., peut-on parler d’une couverture de qualité? On
sait que la quantité ne garantit pas la qualité! Influence communication a
produit un graphique intéressant sur le traitement de l’information :
Traitement
médiatique du conflit étudiant :
On constate dès
le premier coup d’œil que les arguments des parties ont graduellement cédé du
terrain devant la médiatisation des actes de violence. Comme quoi un conflit
qui perdure et pourrit se radicalise! Peut-on affirmer que ce conflit est
traité par les médias traditionnels avec toute l’objectivité journaliste qu’il
mérite? Je suis loin d’être convaincu!
Plusieurs
éditorialistes et chroniqueurs ont pris carrément parti pour le gouvernement.
Richard Martineau au Journal de Montréal,
Gilbert Lavoie au Soleil, André
Pratte et Alain Dubuc à la Presse ont
beaucoup écrit contre la position des étudiants. Par contre, à la Presse,
d’autres journalistes ont été plus conciliants avec la position des
étudiants : Lagacé, Elkouri..
Il y a aussi des sympathisants au Devoir (Josée Boileau), au journal Voir (Josée Legault). Le blogue de
Jean-François Lisée (http://www2.lactualite.com/jean-francois-lisee/)
avait aussi une saveur pro-étudiante.
À la télévision,
autre média populaire s’il en est, TVA et V ont semblé pencher vers la position
du gouvernement. Quant à Radio-Canada (et son canal de nouvelles en continu RDI),
plusieurs téléspectateurs ont noté un penchant vers la position des étudiants.
D’ailleurs, même l’ombudsman de Radio-Canada a dû traiter quelques plaintes
concernant le supposé «parti pris» des journalistes impliqués. (http://blogues.radio-canada.ca/ombudsman/archives/1616)
Évidemment,
l’analyse de contenu de la couverture médiatique du conflit étudiant reste à
faire. Il est très prématuré de tirer
des conclusions définitives. Mais on peut déjà poser une hypothèse de recherche :
1)
Les
journaux et la télévision ne sont pas neutres. Ils tiennent une position idéologique.
2)
Le
lectorat et l’auditoire de ces médias s’aligne sur la même position
idéologique.
Mais il faut se
pencher sur un autre phénomène tout à fait fascinant lorsqu’on s’intéresse
à ce conflit : l’utilisation des médias sociaux. Les blogues, Facebook et
surtout Twitter ont été des vecteurs de mobilisation extraordinaire pour les
étudiants. Il faudra absolument analyser minutieusement l’utilisation des
médias sociaux. D’ores déjà, on peut affirmer qu’il y a une fracture
générationnelle importante quant à l’utilisation de ces médias. La génération C
(les moins de 30 ans) gravite massivement dans la sphère des médias sociaux.
Depuis quelques
années, personnellement, j’ai remarqué une nette migration des étudiants vers
les médias sociaux. Nos jeunes ne regardent à peu près plus la télévision,
n’écoutent plus la radio et ne lisent pratiquement plus la presse écrite. À
toutes les années, dans le cadre du cours de Méthodes quantitatives,
j’administre un petit questionnaire portant sur plusieurs dimensions de leur
vie quotidienne. Je leur demande où ils s’informent. Dans une proportion
écrasante, ils me parlent de Facebook, Twitter, des blogues. Ils sont branchés
et ont définitivement tourné le dos aux médias traditionnels. D’ailleurs,
depuis une dizaine de jours, plusieurs journalistes des médias traditionnels
ont senti la grogne des manifestants. Quelques-uns ont même été violentés.[2]
Bien que tout à fait inacceptables et non cautionnables, ces actes peuvent
s’expliquer ainsi : les manifestants jugent que les médias traditionnels
ont pris parti contre le conflit étudiant. Ils jugent que ce sont des appareils
idéologiques au service du pouvoir politique.
Or, pour ceux
qui ont suivi le conflit sur les médias sociaux, vous savez que la position
idéologique dominante – pour ne pas dire écrasante, c’est, au minimum le gel
des droits de scolarité, sinon même la gratuité! Juste par curiosité (si ce
n’est déjà fait), allez visiter CUTV (http://cutvmontreal.ca/),
la télévision communautaire des étudiants en communication de l’université
Concordia! Vous allez voir des images là que vous n’avez jamais vues dans les
médias traditionnels! Les manifestations étudiantes sont couvertes sous un
angle tout à fait différent. Et le travail des policiers n’apparaît pas sous
son meilleur jour… Sur Twitter, il faut absolument consulter : #assnat, #ggi, #manifencours.
Donc, nous
vivons ici un conflit générationnel important à travers la «grève» étudiante.
D’une part, les plus de 30 ans qui continuent de consulter les médias
traditionnels; d’autre part, la génération C qui s’alimente dorénavant aux
médias sociaux.
L’analyse de
contenu de la couverture médiatique du conflit étudiant devra de façon
incontournable inclure les médias sociaux dans son corpus. Mais on peut déjà
poser une hypothèse de recherche :
1)
Les
médias sociaux ne sont pas neutres. Ils tiennent une position idéologique.
2)
Les
utilisateurs de ces médias ont moins de trente ans.
Déjà, en
consultant les quelques sondages d’opinion qui ont été réalisés sur le conflit,
on peut voir apparaître cette ligne de démarcation générationnelle. Ainsi, dans
le dernier sondage réalisé par Léger marketing le 10 mai dernier, on a noté le niveau d’appui au mouvement
étudiant par génération. Ainsi, chez les 18-35 ans, on appuie majoritairement
la position des étudiants (51% pour, 44% contre). C’est le contraire chez les
plus de 35 ans (61% contre, 29% pour).[3]
D’où ma
conclusion : Si tu regardes TVA ou V, lis le Journal de Montréal ou La
Presse, tu es vert. Si tu t’informes sur les médias
sociaux, tu es rouge! Si tu lis Le Devoir
et regardes Radio-Canada et RDI, t’es plutôt rouge.
Michel
Huot, sociologie, CBA
[1] Note : Le
poids médias établit le pourcentage qu’a occupé une nouvelle, un événement ou
même une personne par rapport au volume total de nouvelles au cours de la même
période.
[2] Voir notamment cet article
du Devoir qui fait une analyse
pertinente du phénomène des agressions sur les journalistes : http://www.ledevoir.com/societe/medias/350262/le-choc-des-perspectives
[3]Léger Marketing, «Sortie de
crise», En
ligne : http://www.legermarketing.com/admin/upload/publi_pdf/R2012-05-15-MAI-021-.pdf. Consulté le 16 mai 2012.
Bonjour
RépondreSupprimerJe viens de lire avec intérêt votre billet.
La grève des étudiants contre la hausse des frais de scolarité;
Dis-moi quel média tu consultes et je te dirai si tu es rouge ou vert!
http://rshcq.blogspot.ca/2012/05/lagreve-des-etudiants-contre-la-hausse.html
Je suis heureux que vous vous intéressiez au phénomène médiatique. Toutefois, je me permets quelques mises en garde.
1- Ne mélangez pas contenu journalistique et commentaires.
Chaque média compte des commentateurs qui sont libres de leurs orientations et peuvent avoir un parti pris dans la mesure où ils ont la capacité de le défendre. Le reporter lui doit simplement rapporter la nouvelle de la façon la plus objective et équilibrée qu’il est possible de le faire. Comme vous vous en doutez ça donne des contenus très différents.
2- Ne mélangez pas commentateur et éditorialiste
Comme je viens de le mentionner, le commentateur ou chroniqueur doit prendre position et la défendre, même si elle est à l’opposé de celle du journal. L’éditorialiste lui représente la vision et la position du journal et la défend. D’un côté, vous pouvez donc avoir Rima Elkouri et Michèle Ouimet et d’un autre André Pratte. La dualité des opinions permet une richesse des points de vue.
3- Média et journaliste
Donc, la position éditoriale n’a rien à voir avec celle d’un reporter ou d’un chroniqueur.
4- Orientation des médias
Pour analyser le contenu de chaque média, je peux vous confirmer qu’aucun média n’a une position unilatérale. Même si on pouvait être tenté de la croire, de façon très rationnelle je pourrais prendre chacun des médias traditionnels et vous démontrer sans mal que chaque média compte des contre-partis. Quand un débat devient aussi émotif, c’est normal de croire le contraire. Dans le contexte actuel, on manque beaucoup de recul. D’ailleurs, j’avoue qu’il temps que certains lancent un appel au calme. De plus, je vous confie confidentiellement que depuis 2 semaines, nous remarquons qu’un mot est chaque jour utilisé un peu plus dans les médias sociaux et surtout à la radio hors-Montréal. Il s’agit du mot “armée”. La masse des médias ne le voit pas encore mais environ tous les 3 jours, le mot armée associé au conflit étudiant voit son utilisation doubler.
5- Crédibilité des médias
La crédibilité des médias traditionnels est attaquée. En relations publiques, les centrales syndicales sont les organisations qui utilisent le plus souvent cette stratégie. Au cours des derniers mois, quand bon nombre de reportages ont lié des “organisations” syndicales à la corruption, plusieurs journalistes ont fait l’objet de menace. Au lieu de combattre les faits avancés, des leaders syndicaux se sont attaqués aux messagers. Étonnamment, si bon nombre de citoyens remettent en question la crédibilité des médias traditionnels, ils n’hésitent pas à accorder de la crédibilité à la folle rumeur lancée sur Twitter voulant que Gabriel Nadeau-Dubois soit le fils de Pascal Nadeau (fille de Pierre Nadeau).
Même si les médias traditionnels sont constitués d’égos et parfois de raccourcis agaçants ils jouent un rôle fort positif dans l’ensemble des enjeux de société. En fait, bien que nos médias soient à mon avis trop régionaux et pas assez ouvert au reste du monde, je ne vois pas vraiment de grandes différences entre nos médias et ceux qu’on peut trouver un peu partout.
J’ajouterais que si CUTV avait avantage à s’ouvrir aux différents angles et idées en se trouvant aux côtés des médias traditionnels, elle ajoute au moins une richesse au débat en donnant de la diversité.
Voilà pour tout de suite.
Bonne journée !
Jean-François Dumas
Président
Influence communication
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